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L’innovation peut contribuer à combler le fossé de l’infrastructure

L’été venu, le même refrain semble se répéter dans les villes : celui des ponceuses, des marteaux-piqueurs et des travaux de construction.

L’été venu, le même refrain semble se répéter dans les villes : celui des ponceuses, des marteaux-piqueurs et des travaux de construction. Les pays nordiques profitent des mois chauds pour reconstruire ‒ resurfaçage des routes, réparation des égouts et remplacement des conduites d’eau. Et nous devons tous en supporter les inconvénients. Des avancées technologiques possèdent un potentiel énorme pour réduire les coûts croissants que doivent assumer les municipalités pour renouveler leurs infrastructures vieillissantes.

Prenons la ville de Hamilton par exemple. En 2006, elle devait réparer ses conduites d’eau. Pour y arriver, elle a introduit des robots dans les égouts pour insérer un nouveau tuyau flexible dans une conduite. Des chercheurs de la Queen’s University, de Kingston, ont collaboré avec la ville pour appliquer la technologie du revêtement d’argile. Ainsi, les citoyens n’ont plus à subir pendant des mois, saletés, poussières et autres inconvénients associés aux travaux de creusage sur leurs terrains et trottoirs; ils ont tout juste croisé un camion dans lequel se trouvaient des ingénieurs et des techniciens qui s’affairaient calmement à superviser le travail souterrain.

Et qui plus est, il n’en a coûté qu’une fraction de la facture habituelle pour creuser le sol et remplacer les conduites.

Aujourd’hui, toutes les municipalités doivent assumer des coûts gigantesques pour réparer et remplacer les routes, les égouts, les services publics et autres infrastructures qui les soutiennent. En mars 2014, le gouvernement fédéral a annoncé des investissements d’infrastructure de 14 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années. Malgré tout, la gestion de ces investissements risque d’être au cœur des discussions des maires, des conseillers municipaux et du personnel des villes réunis au congrès annuel de la Fédération canadienne des municipalités qui se déroulera plus tard cette semaine à Niagara Falls.

Et à juste titre. Le Centre canadien de politiques alternatives a publié un rapport l’an dernier dans lequel il établissait à 145 milliards de dollars le fossé de l’infrastructure - valeur de l’infrastructure actuelle par rapport à celle de l’infrastructure nécessaire. Étant donné les pressions qui s’intensifient sur tous les paliers de gouvernement pour combler le déficit d’infrastructure ‒ sans compter toutes les indications qui démontrent que l’infrastructure ne tient pas le coup : nids-de-poule, avis d’ébullition, refoulements d’égouts et pannes de courant ‒ les villes canadiennes se trouvent à un moment charnière. À l’heure actuelle, la plupart des routes, des ponts et des canalisations d’eau et d’égout du Canada ont déjà dépassé largement leur durée de vie prévue et doivent être remis en état.

Alors que les discussions tournent autour de la question du financement de la modernisation de notre infrastructure urbaine, il faut garder à l’esprit l’élément tout aussi crucial de la construction de l’infrastructure. La recherche et l’innovation sont au cœur de la solution de ces deux enjeux, et continueront de l’être.

Aujourd’hui, les défis sont différents de ceux qui existaient après la Seconde Guerre mondiale, période à laquelle la grande partie de l’infrastructure urbaine voyait le jour. Les changements démographiques – 80 pour cent des Canadiens vivent maintenant dans de petits et grands centres urbains – et les changements météorologiques exercent une pression sans précédent sur les infrastructures vieillissantes. Les technologies des années 1950, 1960 et 1970 ne sont tout simplement plus appropriées au 21e siècle.

Les villes veulent des solutions rentables et novatrices aux défis qu’elles doivent relever. Et les universités et les collèges du Canada y travaillent activement.

Une équipe de chercheurs de la University of British Columbia a créé des fibres synthétiques à haute performance que l’on peut pulvériser à l’aide d’un tuyau à haute pression directement sur la surface en béton d’anciens ponts et passages supérieurs pour en augmenter la solidité et la durabilité. Ce revêtement comprend aussi des capteurs à fibres optiques capables de transmettre des signaux numériques à des ingénieurs pour surveiller l’état de la structure en temps réel.

Par ailleurs, à la Lakehead University, à Thunder Bay, en Ontario, des chercheurs ont mis au point un adjuvant pour béton qui peut rendre ce matériau jusqu’à 40 pour cent plus solide et réduire les émissions de gaz à effet de serre grâce à une utilisation moindre de matériaux, ce qui, à long terme, est à la fois écologique et rentable.

En plus de constituer une partie de la solution pour nos villes, de telles technologies peuvent être utilisées dans le monde entier, se traduisant ainsi par des avantages financiers importants pour le Canada.

Au moment d’élaborer les plans de renouvellement des infrastructures, les municipalités devront envisager l’utilisation de cette recherche de pointe pour réaliser des économies aujourd’hui et mettre en place des systèmes de soutien capable de répondre à la demande qui se profile pour le prochain siècle.

Gilles Patry est président-directeur général de la Fondation canadienne pour l’innovation, la seule organisation qui finance l’infrastructure de recherche de pointe au pays. Cet article d’opinion a été publié à l’origine sur le site Web du journal Toronto Star le 27 mai 2014.