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Groupe de travail sur la stratégie en matière d’intelligence artificielle : réponse des organismes de financement de la recherche ‒ Pilier Talents et recherche

Nous nous réjouissons de pouvoir présenter nos observations au Groupe de travail sur la stratégie en matière d’intelligence artificielle (IA) dans le cadre du sprint national de 30 jours qui lui permettra de peaufiner l’approche du Canada à l’égard de l’IA.

Les avantages actuels du Canada au chapitre de la recherche reposent sur les atouts complémentaires des organismes subventionnaires fédéraux – le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) – ainsi que de la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI), qui travaillent de concert pour soutenir un écosystème de recherche dynamique et essentiel. Dans le domaine de l’IA, le CRSNG a financé les travaux menés en début de carrière par les professeurs Yoshua Bengio et Geoffrey Hinton. Collectivement, les organismes ont investi plus d’un milliard de dollars dans la recherche en IA au cours des dix dernières années. Mentionnons entre autres les travaux réalisés par le professeur Bengio avec plus de 150 partenaires, appuyés par le Fonds d’excellence en recherche Apogée Canada des trois organismes, dans le cadre de leur mission consistant à mettre l’IA au service de la société.

La recherche financée par les organismes déterminera la manière dont l’IA façonnera notre avenir. Le CRSNG soutient la recherche axée sur la découverte et la recherche appliquée de calibre mondial en informatique, en mathématiques et en génie, sur lesquelles reposent les systèmes d’IA. L’organisme valorise ces découvertes par l’intermédiaire d’équipes universitaires qui collaborent avec les secteurs privé et sans but lucratif pour transformer les méthodes d’IA en applications concrètes dans des domaines tels que la modélisation climatique, la découverte de matériaux, la fabrication de pointe, l’énergie propre et les services numériques sécurisés. La recherche financée par le CRSH génère les connaissances éthiques, juridiques, comportementales et stratégiques qui sont nécessaires pour concevoir une IA au service des personnes et des établissements. Elle examine également la manière dont l’IA transforme le processus de recherche proprement dit grâce à la capacité de cette technologie à repérer des tendances, à prédire des résultats, à générer des hypothèses et des contenus novateurs et à recommander des approches pour la recherche. Les vastes réseaux de recherche du CRSH favorisent une gouvernance responsable, une conception centrée sur l’humain et une adoption dans le monde réel, renforçant ainsi la confiance du public. La recherche financée par les IRSC se concentre sur l’IA appliquée aux systèmes de soins de santé et à la gestion des patientes et patients, à la découverte de médicaments et à la recherche moléculaire ainsi qu’à la prédiction du risque de cancer et au traitement de cette maladie. Ces travaux mettent ainsi en lumière l’expertise croissante du Canada dans l’application de l’IA à la transformation de la prestation des soins de santé et à la recherche biomédicale. La FCI joue un rôle déterminant dans l’avancement de la recherche en IA au sein des universités canadiennes. Grâce à des investissements stratégiques dans l’infrastructure et les plateformes nationales, la Fondation a permis aux établissements d’attirer les meilleurs talents, de favoriser la collaboration interdisciplinaire et de renforcer la capacité nécessaire à une recherche de calibre mondial reposant sur l’IA. 

Les trois organismes et la FCI assurent la liaison entre, d’une part, le financement de la recherche et des talents et, d’autre part, l’infrastructure et les partenariats, et ils exercent leur action dans divers secteurs et régions grâce aux universités, aux collèges, aux instituts, aux hôpitaux et aux entreprises. En misant sur les forces collectives dans différents domaines et secteurs, le Canada met à profit l’excellence de sa recherche en IA pour générer des avantages pour la société et l’économie en veillant à ce que l’innovation, l’inclusion et la confiance demeurent au cœur de son avenir en ce qui a trait à l’IA.

Les talents et la recherche constituent un thème clé de la demande d’avis du gouvernement. Notre contribution s’articule autour de trois idées : 1) l’IA au service de la science; 2) les talents comme futur moteur de l’IA; et 3) le renforcement de notre architecture de données connectée.

L’IA au service de la science. Les trois organismes et la FCI sont particulièrement bien placés pour faire évoluer la recherche en IA vers une recherche soutenue par l’IA. En faisant de l’IA un puissant assistant dans tous les domaines de recherche, le Canada peut accélérer la découverte et l’innovation dans des secteurs d’importance nationale, comme la santé et les sciences de la vie, le climat et les industries propres, la fabrication et l’automatisation industrielle, les finances et les services bancaires ainsi que les services publics modernisés. D’ailleurs, la prochaine percée dans n’importe quel domaine découlera vraisemblablement de l’application de l’IA pour soutenir, accélérer ou introduire une nouvelle capacité dans un projet de recherche.

C’est pourquoi nous recommandons la poursuite et l’accroissement du soutien à la recherche en IA et à la recherche soutenue par l’IA et exprimons notre engagement à cet égard. Pour ce faire, nous favorisons les découvertes canadiennes dans le domaine et leur application dans notre écosystème de recherche national. Les travaux motivés par la curiosité ou axés sur une mission particulière dans toutes les disciplines progresseront conjointement. Ainsi, les méthodes d’IA de pointe seront perfectionnées et exploitées dans l’ensemble des champs de recherche; l’infrastructure de calcul souveraine sera renforcée et les données seront partagées et rendues accessibles de manière responsable dans tous les domaines de la recherche. 

Les talents comme futur moteur de l’IA. Dans une économie du savoir, les talents en recherche constituent le principal atout du Canada et sont au cœur de la mission des organismes. Pour que notre recherche continue de se démarquer à l’échelle mondiale, nos chercheuses et chercheurs de talent actuels et futurs, dans l’ensemble des disciplines et des établissements, doivent être formés à la culture de l’IA et en comprendre les forces et les limites afin de pouvoir l’utiliser pour concevoir, élaborer et intégrer des projets de recherche soutenue par l’IA à la fois en laboratoire et en conditions réelles.

Les organismes sont prêts à diriger la mise en œuvre d’une stratégie de formation à la recherche en IA au service de la science qui élargira la participation et permettra d’attirer et de retenir les talents. À l’échelle mondiale, la priorité accordée au perfectionnement et à la mobilité des talents indiquera que le Canada est un creuset de talents en IA non seulement dans les domaines habituels de l’IA, mais aussi dans toutes les disciplines où celle-ci peut devenir un outil puissant, ce qui ouvrira la voie à des collaborations internationales durables. On créera ainsi une main-d’œuvre solide, diversifiée et mobile qui transformera la recherche canadienne en résultats concrets.

Le renforcement de notre architecture de données connectée. Pour exploiter pleinement le potentiel transformateur de l’IA en recherche et en innovation, il est essentiel d’adopter des pratiques responsables en matière d’IA ainsi que des pratiques de gestion des données robustes et normalisées dans tout l’écosystème de recherche canadien. Des données de qualité interopérables et gérées de manière éthique constituent la pierre angulaire de la découverte fondée sur l’IA. En nous conformant aux normes mondiales telles que les principes FAIR (données faciles à trouver, accessibles, interopérables et réutilisables) et en investissant dans une infrastructure sécurisée et évolutive qui respecte la souveraineté des données canadiennes et autochtones, nous pouvons garantir que les chercheuses et chercheurs canadiens seront outillés pour collaborer de manière responsable avec des pairs de différentes disciplines.

Dans le contexte des soins de santé et de leur prestation, cela signifie que le Canada doit se doter d’une stratégie cohérente en matière de données sur la santé qui relie de façon efficace les ressources actuelles – en intégrant les ensembles de données lorsque c’est possible et en coordonnant les réseaux, les programmes et les plateformes déjà en place. L’idée n’est pas de créer de nouveaux systèmes, mais plutôt de mieux coordonner et utiliser les ressources en place en renforçant la capacité de calcul nationale, en assurant l’interopérabilité et en créant des cadres de gouvernance et de confiance qui permettent une circulation des données sécurisée et éthique. Grâce à l’harmonisation de l’infrastructure et des politiques et à la confiance du public, le Canada pourra mieux coordonner les investissements actuels dans les données sur la santé à l’appui de la recherche, de l’innovation et de l’amélioration des résultats. 

À l’heure actuelle, l’infrastructure des données de recherche canadienne – notamment les ensembles de données sur la santé essentiels au développement de l’IA – repose en grande partie sur des subventions ou contributions financières à durée limitée accordées par des organismes comme les IRSC, le CRSNG et la FCI. Lorsque ces fonds arrivent à échéance, il y a un risque de perte de données, d’accès et de continuité analytique dans des ensembles de données essentiels, ce qui pourrait réduire les retombées à long terme des investissements actuels. L’établissement d’un mécanisme de financement stable et à long terme pour la gouvernance des données de recherche sur la santé est donc tout aussi important que le lancement de toute nouvelle initiative en IA. Sans financement soutenu, il est impossible d’entraîner, de valider ou de mettre à jour les modèles. Le Canada ne peut donc en pareil cas garantir la sécurité, l’interopérabilité et la disponibilité des données sur la santé pour assurer une innovation responsable.

Une approche unifiée de la gouvernance des données, fondée sur des données fédérées et interopérables respectant les exigences en matière de sécurité et de protection de la vie privée ainsi que les secteurs de compétence provinciaux et fédéraux, permettra non seulement de renforcer l’efficacité et les retombées des applications d’IA, mais aussi de positionner le Canada comme chef de file d’une innovation responsable et inclusive. Cet enjeu est particulièrement important dans le domaine de la santé, où il faut accorder la priorité à l’établissement d’une gouvernance en matière de connectivité fondée sur les principes du consentement et du partage des données qui favorisent la collaboration entre le secteur privé, le milieu universitaire et les systèmes de santé. En intégrant ces principes, on créera un écosystème sûr, dynamique et collaboratif qui accélérera les découvertes scientifiques tout en maintenant la confiance du public.

Le Canada bénéficie d’une longueur d’avance en matière d’IA grâce à son excellente recherche et à ses talents de calibre mondial. Il est tout à fait possible de renforcer ces atouts pour générer des retombées sociales, économiques, sanitaires et environnementales pour la population canadienne et faire du pays l’un des grands pôles mondiaux de la science et de l’innovation.

Nous remercions le Groupe de travail de nous avoir offert la possibilité de contribuer à cette réflexion et serions heureux de fournir un complément d’information par écrit ou de participer en personne à l’élaboration et à la mise en œuvre de la stratégie en matière d’intelligence artificielle qu’adoptera le Canada.

Lisez la déclaration sur science.gc.ca